New Book | La griffe du peintre
From Le Seuil:
Charlotte Guichard, La griffe du peintre: La valeur de l’art, 1730–1820 (Paris: Le Seuil, 2018), 352 pages, ISBN: 978-2021402315, 31€.
Comment le nom de l’artiste est-il devenu un élément clef de la valeur symbolique et commerciale des œuvres ? La question est au cœur de cette enquête novatrice sur la signature en peinture. C’est à Paris, entre les années 1730 et 1820, que se déploie cette enquête richement illustrée, lorsque s’instaurent les institutions modernes des mondes de l’art : salons et expositions publiques, ventes aux enchères, musées. Les peintres français (Jean-Siméon Chardin en tête) se mettent à apposer leur nom sur les tableaux alors même que le nom de l’artiste devient un élément clef qui organise les écrits sur l’art : critiques, catalogues, cartouches et cartels, au point qu’un contemporain constate alors, avec dépit, que les amateurs se mettent à acheter « des noms, et non plus des œuvres ».
Mais pourquoi placer ainsi son nom sur un panneau de bois ou sur une toile ? La tradition est ancienne, et remonte à l’Antiquité. Pourtant, les peintres de l’âge des Lumières surent investir le nom de significations nouvelles. À Paris, le marché pour leurs peintures s’était élargi, avec la multiplication des ventes aux enchères, et ils ne pouvaient plus se contenter des cercles étroits de la commande princière ou celle des riches élites. Il fallait susciter le désir de consommation au moment où un premier capitalisme commercial fondé sur le luxe et sur la mode connaissait un essor sans précédent avant de s’imposer aux sociétés européennes au siècle suivant. La signature fut ce lieu, dans le tableau, où la valeur pouvait se concentrer et perdurer, où le culte de l’artiste pouvait matériellement se déposer.
Charlotte Guichard est historienne de l’art, directrice de recherche au CNRS et professeure attachée à l’École normale supérieure. Spécialiste des cultures visuelles et de l’art des Lumières, elle a publié Les Amateurs d’art à Paris au XVIIIe siècle (Champ Vallon, 2008) et Graffitis. Inscrire son nom à Rome. XVIe-XIXe siècle (Seuil, 2014).
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